White Russia, red wine and spill blood

Le brouillard s'était levé depuis l'aube et persistait en cette fin de matinée au nord de la ville de Louga, en Russie. Situé dans le quartier ancien et plutôt reculé, la petite église ancienne pointait difficilement dans cet épais nuage. Le silence mélangé à cette curieuse atmosphère rendait le lieu plutôt atypique et hors du temps. Vêtu d'une épaisse soutane, un des prètres venait de sortir à l'extérieur, surmonté d'un épais manteau pour affronter le vent glacial qui soufflait et faisait s'envoler la neige amassée sur le sol dans de légères raffales. Il attendit ce qui lui sembla une éternité, se réchauffant les mains avec la chaleur de son souffle, ses muscles commençant à s'enquiloser et ses genoux trembler à cause de la température. Il scrutait l'horizon qu'il ne pouvait pourtant pas percevoir avec le brouillard et plissait les yeux espérant bientôt voir apparaître une silhouette se profiler au loin. Quelques minutes plus tard ce n'est pas une mais trois corps qui tranchèrent l'épais nuage, se dirigeant d'un pas lent dans sa direction.

Une heure plus tôt...

Juliane Eckhart descendit les marches d'une démarche assurée pour enfin retrouver le contact de sa terre de naissance. Elle venait d'atterir de son jet depuis les Etats-Unis et était de retour chez elle . Elle portait un épais manteau blanc en fourrure et son visage était masqué par une paire de lunettes de soleil, bien que celui-lui était quasiment inexistant à cette époque de l'année. Deux hommes l'accompagnaient, tout deux vêtus de noir et l'un portait une petite malette grise à la main. Elle les regarda alternativement un bref instant avant de se diriger vers un 4x4 noir garé non loin de là, un troisième homme lui ouvrant la portière arrière. Ce dernier prit place au volant et démarra une fois que les deux hommes eurent fermé leur portière respective.
Après trois quarts d'heures de route, le chauffeur s'excusa et leur expliqua que la voiture ne pouvait aller plus loin à cause de la neige non déblayée. Juliane ne dit mot et lui glissa simplement un billet avant de descendre de la voiture, ses bottes en cuir s'enfonçant dans l'épaisse couche blanche. Elle commença à marcher droit devant elle, connaissant visiblement le chemin les yeux fermés, suivie rapidement de ses deux loyaux employés.

Elle aperçut enfin le toit de l'église après un bon quart d'heure de marche. Un sourire discret apparut au coin de ses lèvres mais disparut presque aussitôt. Elle reprit sa marche et vit enfin la silhouette d'un homme de petite taille qui était apparemment resté trop longtemps à l'attendre. Il la salua cependant respectueusement ainsi que ses deux compagnons et les invita rapidement à pénétrer dans les lieux. Il s'inclina pour laisser le passage à Juliane qui le remercia d'un signe de la tête. Elle s'arrêta dans le grand hall et une fois que tous les quatre furent entrés, l'homme qui les avait accueilli quitta la pièce d'un pas rapide. La jeune femme en profita pour enlever son imposant manteau en l'envoyant sur le premier des hommes et tendit une main vers le second pour qu'il lui donne la malette.

"Attendez moi ici" ordonna Juliane qui partit à la suite du prètre, ses talons hauts marquant le sol d'un bruit sec à chaque pas, brisant l'espace d'une seconde à chaque fois le silence religieux qui régnait dans ce lieu.

Elle retrouva l'homme au bout de la nef et le suivit dans une autre pièce où un prètre, plus âgé cette fois était en train de prier devant une statue de Marie-Madeleine.

en russe...

"Il est écrit dans la Bible que Marie-Madeleine était une prostituée, étrange que vous la vénériez" dit-elle pour s'annoncer.

Le prètre se retourna et sourit à l'entente de la phrase de la jeune femme. "Chacun possède ses propres croyances ma chère Juliane, je suis heureux de vous revoir" répondit l'homme en s'avançant et en lui offrant son bras qu'elle accepta poliment.
Ils commencèrent à marcher le long d'un lon couloir. "Votre grand-père a laissé un mot à votre intention, malheureusement, une affaire urgente l'a retenu à St-Petersbourg"

"Vous a t-il dit de quoi il s'agissait" questionna Juliane avec intérêt.

"J'ai bien peur que Monsieur Eckhart soit trop mystérieux pour moi" répondit ce dernier en riant légèrement.

Ils pénètrèrent dans une petite salle remplie de tableaux anciens sur toute la longueur du mur qui formait un cercle parfait. En son centre se trouvait un petit autel qui menaçait de s'effondrer d'un moment à l'autre mais qui supportait encore le poid d'une petit boîte de métal grise. La jeune femme lâcha le bras du prètre et s'avança jusqu'au centre, posa sa malette à côté de la boîte et ouvrit les deux loquets qui lâchèrent dans un bruit sec qui se répercuta dans toute la pièce. L'intérieur était couvert de mousse noire et un emplacement de la même taille que la boîte formait un creux rectangulaire. Juliane vérifia son contenu, où huit fioles étaient rangées sur deux rangées parfaitement symétriques. Elle referma soigneusement le colis et le déposa dans la malette avant de la refermer aussi. Elle se retourna et refit le chemin en sens inverse pour rejoindre le père.

"Je regrette que vous ne puissiez rester plus longtemps Juliane" se plaignit le prètre gentiment en la détaillant. "Vous semblez fatiguer, j'espère que ces Américains ne vous mène pas la vie dure au moins"

"Tant qu'ils ne m'obligent pas à avaler leur Hamburger, je crois que je survivrai, mais des affaires importantes m'attendent au pays des cow-boys. Je vous remercie et saluez mon grand-père pour moi."

"Ah oui j'allais oublier la lettre" dit-il en lui tendant une enveloppe mauve.

Elle le remercia du regard et laissa le prètre à ses occupations pour rejoindre ses deux employés qui l'avaient attendu avec patience dans l'entrée. Elle tendit la malette au même homme qui s'était chargée de son voyage à l'allé et le second l'aida à remettre son manteau délicatement. Elle remit ses lunettes de soleil et ressortit dans le froid glacial de son pas sûr.

Le soir...

Elle était rentrée en fin d'après midi et était directement monté à l'étage, interdisant à tous ses hommes de la déranger sous le moindre prétexte. Elle avait rangé les huit fioles dans son coffre et s'était servi un grand verre de vin français. Un bon bain, quelques morceaux de musique et quelques verres plus tard, elle avait passé un peignoir en soir blanche et s'était confortablement installée dans un fauteuil pour lire la lettre de son grand-père.
Elle fut surprise et un peu déçue de ne trouver que quelques mots... "Ma chère petite-fille, je suis désolé de ne pouvoir voir ton joli visage mais quelque chose m'a retenu. En attendant ton prochain voyage je te laisse à tes occupations, bonne chasse". Le petit mot était accompagné d'une clé USB. Elle brancha la clé à son ordinateur portable et téléchargea le fichier qu'elle contenait. La photo d'un homme d'une trentaine d'années s'afficha à l'écran ainsi qu'un dossier complet sur sa vie jusqu'à ses deux dernières semaines et surtout un listing impressionnant de ses nombreuses victimes. Apparemment l'homme s'était fait mordre par un Vampire il y a deux ans de cela et depuis, il semait des corps un peu partout dans tout le pays.
La jeune femme referma l'appareil et souffla un coup.
Ce n'était pas encore ce soir qu'elle pourrait s'accorder un peu de temps. La jeune femme allait devoir troquer ses jolis habits pour aller se défouler et chasser...

...Elle entra dans la boîte de nuit et mit un certain temps à s'habituer au son de la musique qui résonnait dans ses tympans hyperdéveloppés.
Elle avait apprit en étudiant le dossier de Alan Petersen, qui se faisait appeler Al à présent qu'il venait dans ce club tous les vendredi soirs sans exception, et que chaque samedi matin depuis maintenant deux mois, on retrouvait le corps d'une jeune fille blonde dans la vingtaine. Elle s'était alors habillée pour l'occasion et avait revêtu une perruque blonde, ainsi qu'une jupe un peu trop courte à son goût et un débardeur qui ne descendait pas assez bas. Mais c'était le look idéal si on voulait servir d'appât à un Vampire en mal d'amour.
Elle trouva la chaleur du lieu étouffant et se demanda pendant quelques secondes si le chauffage n'avait pas été monté pour inciter les jeunes à consommer plus de boissons mais à la vue de ces centaines de corps en train de danser dans des gestes mécaniques au son de la musique techno, transpirant à grosses gouttes et collés les uns aux autres, elle dûe se rendre à l'évidence que les radiateurs n'y étaient pour rien. Pourquoi fallait-il que ces créatures aient toujours aussi mauvais goût...
Retrouver Al dans tous ce remu-ménage d'hormones n'allaient pas être chose facile. Elle observa un moment les lieux et décida de monter à l'étage pour avoir une vue plongeante sur la piste de danse. Elle respira un bon coup et pénétra dans l'amas de corps. Elle ne put éviter le contact des peaux en sueur frôlant la sienne, les regards d'invitation plus qu'explicites et quelques mains tendues qu'elle choisit d'ignorer avant de trouver l'escalier et de monter les marches, heureuse d'être sortie de la foule.
Elle jeta un regard circulaire dans les différents salons mais ne trouva pas sa cible. Elle se dirigea alors vers la barrière et s'appuya contre celle-ci afin d'essayer d'apercevoir parmis les centaines de visages celui qu'elle recherchait.

Dix minutes plus tard alors qu'elle commençait à perdre patience, elle sentit sans même se retourner la présence d'un homme à moins de dix mètres si elle en croyait ses sens. Enne se concentra et pût dicerner une eau de toilette bon marché et un déodorant qui ne se mariaient pas très biens ensemble ainsi qu'une forte odeur de tabac et d'alcool, mais ce qui retînt son intention fût cette infime odeur métallique qu'elle arrivait à peine à discerner, celle du sang. Elle ne bougea pas d'un centimètre et attendit que son prince charmant vienne la rejoindre, ce qu'il ne tarda pas à faire. Il se plaça à ses côtés et la dévisagea un long moment sans parler avant qu'elle ne se décide à fixer ses lieux dans les siens.

Il l'avait repéré depuis son entrée fracassante dans la boîte. Il l'avait regardé fendre la foule sans se mêler aux autres de sa démarche féline et avait suivi son ascension jusqu'au premier étage. Il avait alors délaissé la compagnie de la jeune femme qui l'accompagnait pour porter son attention sur la nouvelle venue. Il ne l'avait jamais vu par ici avant ce soir et préféra attendre de voir si elle n'attendait pas de la compagnie. Quand il fut certain qu'aucun homme n'avait rendez-vous avec elle, il s'approcha d'elle et la fixea sans ciller.

Il n'eut pas besoin de dire quoi que ce soit et lui proposa son bras qu'elle accepta avec un léger sourire. Ils se dirigèrent alors ensemble vers les escaliers qu'ils redescendirent et se dirigèrent vers le bar où le Vampire commanda deux cocktails.
Juliane sourit poliment mais trouva qu'en plus d'un mauvais goût prononcé pour la musique et le parfum, il ne savait pas non plus apprécié de bons alcools. Elle ne fit cependant aucune remarque et but sa boisson sans broncher.

"Il ne me semble pas t'avoir déjà vu ici auparavent, je m'en serai souvenu" dit-il il, rompant ainsi le silence.
Et pour couronner le tout il ne savait pas draguer...

"Je suis nouvelle en ville, on m'a conseillé l'endroit pour son ambiance si...particulière et les gens que l'on pouvait y rencontrer" répondit-il en appuyant bien sur son sous-entendu.

"Et jusque là qu'en dis-tu?"

"Je n'ai pas encore été déçue."

Ils échangèrent encore pendant un petit moment quelques banalité d'usage avant que Juliane ne prenne les choses en main et lui fasse comprendre qu'elle n'avait pas l'intention de passer sa nuit ici et qu'elle comptait bien profiter du temps qu'il lui restait ailleurs que dans cet endroit. Il comprit le message et ils sortirent enfin de la boîte par la ruelle arrière. La jeune femme en profita pour respirer à plein poumon l'air frais de la nuit et la créature ne put s'empêcher de fixer son cou fin avec un peu trop d'insistance.
Ils marchèrent sur quelques mètres mais le Vampire qui avait visiblement très soif s'arrêta et la prit par la taille d'un de ses deux bras puissants. Il la plaqua sans retenu contre le mur de brique de la ruelle et plongea son étrange regard d'un vert scintillant dans celui de sa partenaire.

"Si on passait aux choses sérieuses" proposa l'homme en arquant un sourcil dans une mimique qui devait se vouloir séductrice avec les autres femmes.

"Tu veux parler d'une séance sportive à la verticale dans cette ruelle crasseuse et sordide ou du moment où tu vas sortir tes crocs et me les enfoncer dans la gorge?" questionna Juliane en le repoussant violemment. "Pourquoi est-ce-que vous paraissez tous aussi répugnant et pourtant si sûr de votre charme?"

Il la regarda sans comprendre et changea d'expression quand l'information réussit enfin à percer sa matière grise et à arriver à la région de la compréhension d'informations. Il sourit sadiquement comme si il appréciait déjà le combat qu'il croyait gagné et savourait son repas, vendant la peau de l'ours...

Il sauta sur Juliane en quelques secondes et essaya de la maîtriser tant bien que mal mais il se rendit à l'évidence qu'elle ne serait pas aussi facile que ça à tuer. Il mit les bouchées doubles et lui envoya un puissant coup de poing dans les côtes avant de revenir à la charge et de s'attaquer cette fois-ci à son visage et en particulier à sa machoire avec un violent crochet du droit.
Juliane mit quelques instants à sortir de sa torpeur, surprise par l'attaque rapide du Vampire et répliqua avec colère en le repoussant une seconde fois en lui enfonçant le talon de sa chaussure dans l'estomac, ce qui lui coupa la respiration et en profita pour mettre son autre talon dans l'arcade alors qu'il s'était plié en deux sous le choc. Cette fois-ci il tomba sur le dos quelques mètres plus loi mais se remit sur ses deux pieds dans un mouvement souple.
La femme en profita pour sortir un couteau qu'elle avait dissimulé le long de l'intérieur de sa cuisse. Malheureusement sa jupe ayant une longueur plus que réduite, la lame du couteau ne dépassait guère les 15centimètres.

Le Vampire repartit à l'attaque et une série de coups de pieds, de poings, de tête et de tous les membre qui pouvaient servir aux deux individus se mêmèrent dans un concert sourd résonnant dans la ruelle.
Juliane retînt un gémissement quand son dos rencontra la surface dure et froide d'une poubelle. Elle vacilla un instant et tituba sur quelques pas alors que le Vampire la regardait avec un regard qui signifait clairement "je vais prendre mon pied à te vider de ton sang". Il fit le tour de la jeune femme et agrippa ses cheveux pour ramener sa tête en arrière, ayant ainsi un accès direct à son cou et à la veine qui palpitait au rythme de son pouls. Il avança sa tête mais au lieu de rencontrer la surface lisse de sa peau il sentit la lame du petit couteau s'enfoncer dans ses côtes. Il ne réussit pas à retenir un gémissement de douleur et Juliane profita de son instant de faiblesse pour l'envoyer valser à son tour contre la poubelle, mais il eut moins de chance de la chance femme et l'extrémité d'une barre de fer apparut au milieu de son abdomen. Il ouvrit les yeux en grands sous le choc et regarda sa proie devenir le prédateur et s'avancer d'une démarche lente vers lui alors qu'il essayait vainement de se dégager.
Elle n'attendit pas qu'il en eut l'occasion et lui fit un nouveau sourire à la base de la gorge. Sachant que cela ne suffirait pas pour le tuer elle tira sur la barre de fer et avant que le corps ne puisse toucher le sol, elle trancha sa tête d'un coup puissant avec le bout tranchant de l'outil. La tête partit en l'air et le corps tomba mollement sur le sol. Alors qu'elle se débarrassait de l'arme et qu'elle regardait rapidement si il y avait un témoin la tête retomba dans un bruit sourd devant ses pieds. Elle la regarda avec dégoût un moment, les yeux fixés dans le regard vert qui n'avait plus grand chose de scintillant et partit en courant vers sa voiture garée trois rues plus loin.

C'est sûr, il lui fallait un bon verre de Chateaubriand pour se remettre sur pieds...